Puisque je vous connais intimement, lorsque j’ai pris connaissance de votre opinion sur l’assassinat du militant éminent Ismaïl Haniyeh, je n’en ai nullement été surpris, et cela pour plusieurs raisons dont la plus importante est cette connaissance profonde que j’ai de vous.
Je suis au fait de vos écarts doctrinaux et comportementaux, ainsi que de votre préférence pour la soumission et l’obéissance aveugle. Je connais votre haine viscérale envers tout rebelle qui ose se dresser contre ses chaînes. Je connais votre habileté à vous dissimuler derrière des interprétations évanescentes du Coran et de la Sunna. Je connais votre vénération pour ces prétendues autorités savantes qui demeurent cloîtrées dans leurs demeures, attendant qu’on les interroge sur la légitimité de tuer femmes et enfants… Je connais ces disciples que vous avez ensorcelés par vos artifices sataniques, les amenant à se soumettre à vous sans broncher… Je connais votre position sur l’État-nation, en lequel vous ne croyez guère, car votre premier ennemi dans ce bas monde est la loi… Je connais ces fatwas malsaines qui outragent la dignité humaine et ne reconnaissent pas le droit des mineurs à toute protection… Et je connais, et je connais, et je connais encore…
Nous vous avons beaucoup entendus, ô cheikhs qui demeurez dans les ténèbres des fatwas nocturnes, il ne fait donc aucun mal que vous m’entendiez un peu ce soir. Un militant de la trempe d’Ismaïl Haniyeh n’est qu’un numéro de plus dans la longue série des grands assassinés par vos mains depuis l’aube de l’islam, à commencer par le calife Omar et jusqu’à lui. Et vous continuez à assassiner tout rayon d’espoir qui brille dans cette nation… C’est vous qui avez assassiné Othman et Ali, c’est vous qui avez tranché la tête de Hussein à Karbala, c’est vous qui vous êtes secrètement alliés aux Mongols pour incendier Bagdad… C’est vous qui avez embrasé les livres d’Ibn Arabi, d’Al-Farabi et d’Al-Ghazali, et c’est vous qui avez pourchassé Ibn Khaldoun partout et emprisonné l’élite des chevaliers, les maltraitant, eux et leurs compagnons, à travers l’histoire.
Nous vous connaissons, et nous suivons votre silence face aux ondulations des bals dansants dans le Golfe au rythme des balles de Gaza, et le ton musical produit par les missiles frappant les hôpitaux, et nous ne nous étonnons guère de la honte de votre silence face aux crimes de la descendance de Sion, ni de votre grand intérêt pour les règles de l’ablution, ses obligations, ses recommandations et ses interdictions…
Si le contexte le permettait, j’aurais pu vous entretenir également de votre honte ancestrale à attiser les discordes, puis à prétendre observer un silence vertueux au nom de la religion. J’aurais pu évoquer votre conception du jihad, qui varie selon l’opportunité de vos intérêts. J’aurais pu dénoncer vos alliances avec le Diable pour des miettes de ce bas monde que vous ne cessez pourtant de maudire. Mais le temps m’est compté aujourd’hui pour vous adresser ces propos. Qu’il me suffise donc de vous dire : « Si vous revenez, nous reviendrons » – car j’ai encore bien d’autres surprises en réserve.
Le peuple algérien, cette fière et noble nation, ne saurait tolérer que la mémoire de ce vaillant militant palestinien soit souillée sur cette terre bénie par son Créateur, cette terre sacrée abreuvée du sang de ses martyrs, tombés en offrande sur l’autel de la liberté.
Ceux qui osent s’attaquer à la réputation de cet homme de conviction, ce combattant de l’ombre qui a consacré sa vie à la libération de son peuple, se heurtent à l’indignation d’un peuple debout, forgé dans les luttes et les sacrifices. Cette Algérie, qui a su s’affranchir du joug colonial au prix de torrents de sang, ne saurait tolérer que l’on s’en prenne à l’honneur de ses frères palestiniens, liés à elle par les liens sacrés de la fraternité et de la solidarité.
Que ceux qui pensent pouvoir ternir la mémoire de ce martyr sachent que les fils de cette terre se dresseront tels un seul homme pour défendre cet héritage de lutte et de résistance. Car la Voie tracée par les aînés est gravée dans la chair même de ce peuple, qui ne transigera jamais avec la dignité de ses enfants, fussent-ils de l’autre rive de la Méditerranée.
Oui, le peuple algérien, dans sa grandeur et sa noblesse, se tiendra toujours aux côtés de la cause palestinienne, quels que soient les assauts de la calomnie et de la diffamation. Car en ces temps troublés, la solidarité entre les peuples opprimés est le seul rempart face à la tyrannie des puissants. Et l’Algérie, fière de son histoire, ne faillira pas à ce devoir sacré.
Y.M.
